AVC, bruit, trafic routier, hypertension
Le rôle du bruit sur le risque d'hypertension ou de maladies coronaires était déjà connu. Une étude danoise montre que l'exposition au bruit routier augmente également le risque d'AVC chez les personnes âgées. 2 février 2011Londres, Grande-Bretagne — Une vaste étude prospective danoise montre que, chez les personnes âgées de plus de 65 ans, le risque d'accident vasculaire cérébral (AVC) augmente de manière dose-dépendante avec le bruit, pour des niveaux d'exposition supérieurs à 60 dB. [1]
L'impact délétère du bruit lié aux transports routiers, ferroviaires et aériens sur le risque d'hypertension artérielle (HTA) ou de maladies coronaires, avait déjà été suggéré [2]-[4]. Mais c'est la première fois qu'une étude montre un lien avec le risque d'AVC.
L'exposition aiguë au bruit est soupçonnée d'activer le système sympathique et endocrinien. Elle provoquerait des modifications de la pression artérielle et de la fréquence cardiaque ainsi qu'une libération d'hormones du stress, expliquent le Dr Mette Sørensen (Institute of Cancer Epidemiology, Danish Cancer Society) et ses collègues.
Certains de ces facteurs étant associés au risque d'AVC, l'équipe danoise a souhaité explorer l'effet du bruit sur le risque d'AVC. Elle a exploité pour cela la cohorte recrutée pour l'étude Diet, Cancer and Health Study, et suivie de 1993-1997 à 2006.
Les participants résidaient dans la zone urbaine de Copenhague ou d'Aarhus et étaient âgées, au début du suivi, de 50 à 64 ans. Tous ont répondu à un questionnaire concernant leur mode de vie, leur alimentation, leur état de santé et des facteurs sociaux.
Les cas d'AVC ont été recherchés dans le registre hospitalier danois, où ils sont consignés depuis 1977. L'exposition au bruit du trafic routier a été estimée à partir de l'adresse de résidence des participants, grâce à un logiciel de modélisation du niveau sonore de l'environnement.
L'ensemble des données nécessaires à l'analyse était disponible pour 51 485 personnes. Parmi elles, 1881 (3,7 %) ont été hospitalisées pour un AVC inaugural au cours d'un suivi moyen de six ans.
L'analyse du risque d'AVC a été ajustée vis-à-vis des facteurs de mode de vie (consommation de tabac, d'alcool, de fruits et légumes, de café, IMC, activité physique), du niveau d'éducation, du niveau moyen de revenus dans la municipalité, de l'exposition au bruit des transports aériens et ferroviaires, et enfin, de la pollution atmosphérique (SO2).
Globalement, l'exposition résidentielle au bruit de la circulation routière s'est montrée associée au risque d'AVC, avec un surrisque de 14 % par pallier de 10 dB.
Ce risque n'était pas significativement modifié après ajustement vis-à-vis de la pression artérielle systolique et diastolique et des traitements antihypertenseurs à l'inclusion.
L'hypertension a beau être le facteur de risque le plus important d'AVC, la persistance du risque après ajustement indique que « d'autres voies sont impliquées dans l'effet du bruit sur le risque d'AVC », soulignent les auteurs.
De même, un antécédent d'infarctus du myocarde ou la présence d'un diabète était sans effet sur le risque d'AVC associé au bruit. Ce risque n'apparait en fait modulé que par deux paramètres : l'âge de la personne exposée et le niveau sonore d'exposition.
Un seuil à 60 dB
La valeur de 60 dB semble constituer un seuil critique, au-delà duquel le risque augmente de manière dose-dépendante dans l'ensemble de la population étudiée.
« Ces résultats sont en accord avec ceux d'une méta-analyse d'études cas-contrôle et d'études de cohorte sur le bruit du trafic routier et l'infarctus du myocarde » indiquent les auteurs. « Cette méta-analyse a montré une relation dose-réponse débutant à un seuil de 60 dB ».
« Cette valeur pourrait donc être un seuil pour les effets à la fois cérébro- et cardiovasculaires du bruit du trafic routier », estiment-ils.
La stratification en fonction de l'âge médian de survenue des AVC dans cette population (64,5 ans), montre que les sujets les plus âgés sont aussi les plus exposés : la corrélation entre exposition au bruit et AVC ne reste en effet significative que chez les sujets d'âge > 64,5 ans.
Chez les plus de 64,5 ans, le risque augmentait de 27 % par palier de 10 dB. Chez les moins de 64,5 ans, le surrisque n'était que de 2 % par palier de 10 dB.
Cet effet de l'âge pourrait s'expliquer par une plus forte prévalence des troubles du sommeil chez les personnes âgées, en lien avec l'exposition au bruit au cours de la nuit, suggèrent les auteurs. En effet, ces troubles contribuent aux lésions cérébro- et cardiovasculaires. Cependant l'étude ne permet pas de distinguer les expositions nocturne et diurne au bruit, les deux étant étroitement corrélées.
Autre limite de l'étude : un important facteur confondant n'a pu être éliminé. Il s'agit du statut socio-économique, connu pour être un facteur prédictif d'AVC.
Or, les participants les plus exposés au bruit étaient le plus souvent également ceux qui possédaient les plus faibles revenus. Aussi est-il possible que des différences socio-économiques représentent un facteur confondant dans l'association entre l'exposition au bruit et le risque d'AVC, admettent les auteurs.
« S'agissant de la première étude de ce genre, les résultats doivent être confirmés par d'autres études avant que l'on puisse tirer des conclusions », concluent-ils.
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Citer cet article: L'exposition au bruit du trafic routier est un facteur de risque d'AVC - Medscape - 2 févr 2011.
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