Le Médiator en question à l'Assemblée nationale

Vincent Bargoin

29 juin 2010

Paris, France — Le retrait tardif du Médiator (benfluorex, Servier) pourrait venir s'ajouter à la liste des problèmes de santé publique contre lesquels les autorités ont été un peu longues à intervenir. Comme le rapporte le Figaro dans son édition du 29 juin, Gérard Bapt, député de Haute-Garonne (PS), rapporteur du budget santé, et par ailleurs cardiologue, a évoqué le cas de ce médicament à l'Assemblée nationale lors de la séance de questions de mercredi dernier. [1]

Il faut dire que le contexte s'y prête. Début juin, en effet, sortait en librairie un livre consacrée au Médiator et à ses effets secondaires (HTAP et valvulopathies), signée par le Dr Irène Frachon, pneumologue au CHU de Brest. Et le 25 juin, le tribunal de grande instance de Nanterre examinait la plainte d'une femme de 60 ans, qui, après avoir pris du Médiator durant plus de 10 ans, a développé une valvulopathie impliquant l'implantation de trois prothèses mécaniques. Le jugement a été mis en délibéré jusqu'au 16 septembre.

Mérite également d'être mentionné un troisième élément, certes indépendant du Médiator, mais qui alourdit encore le climat autour des autorités de santé : le lien entre exposition au chlordécone et cancer de la prostate vient d'être prouvée épidémiologiquement. Or, cet antiparasitaire, interdit dès 1976 aux États-Unis, n'a été interdit qu'en 1990 en France métropolitaine, et en 1993 aux Antilles, dont la terre et les eaux sont aujourd'hui polluées par des taux dépassant 100 fois la norme.

Le Médiator, lui, n'a été suspendu par l'Afssaps qu'en novembre 2009, soit 33 ans après sa commercialisation, et 10 ans après la première alerte de pharmacovigilance.

Dans ce contexte, donc, Gérard Bapt a fait le parallèle entre le Médiator et la chlordécone, rajoutant également le bisphénol à la liste.

« Je regrette l'inertie des agences et la grande prudence avec laquelle on recourt au principe de précaution », a-t-il ironisé à l'Assemblée. En cause, selon Gérard Bapt, les conflits d'intérêts d'un certain nombre d'experts « qui ne devraient pas participer aux évaluations des médicaments. Les agences ne font pas assez le tri entre les experts indépendants et ceux qui publient grâce à l'industrie pharmaceutique », a estimé le député.

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