Milan, Italie — Le Dr Empar Lurbe (Valence, Espagne) a présenté en avant première à Milan, lors de l'ESH 09, les toutes premières recommandations de dépistage et prise en charge de l'HTA pour les enfants adolescents [1], à paraître dans le Journal of Hypertension, courant octobre.
« Avec le développement du surpoids et de l'obésité, il est temps de prendre en compte l'HTA chez les jeunes. Cette HTA peut cacher une néphropathie nécessitant un traitement. Mais un jeune hypertendu peut aussi devenir un adulte à haut risque cardiovasculaire », a expliqué le Pr Giuseppe Mancia (Milan, Italie). « C'est pourquoi nous recommandons désormais le dépistage systématique de l'HTA à partir de l'âge de 3 ans aux MG et pédiatres ».
Mesure auscultatoire et algorithme diagnostique
- La mesure tensionnelle est impérativement auscultatoire.
« Les oscillomètres ne sont pas validés chez l'enfant adolescent. Ce qui souligne la nécessité de développer des sphyngomanomètres sans mercure » note E Lurbe.
- Le dépistage est recommandé à partir de 3 ans (sauf cas particulier où il peut débuter plus tôt)
- L'algorithme diagnostique :
si la PAS et/ou PAD < 90e percentile (percentile fonction de l'âge, du sexe et de la taille...): normotension
si PAS et/ou PAD > 90e percentile : répéter la mesure
si PA dans le 90-95e percentile : surveillance
si PA > 95e percentile : faire une recherche étiologique si patient très jeune et HTA de grade 1-2, chez enfant adolescent avec HTA de grade 2, et dans tous les cas évaluer les atteintes d'organes.
- Indications de la MAPA : impérative avant tout traitement médicamenteux, si diabète 1, si maladie rénale, avant transplantation (coeur, rein, foie).
Passé l'âge de 10 ans, les HTA secondaires viennent en fréquence après celle de l'HTA essentielle. C'est pourquoi ces recommandations « cadrent » la recherche étiologique. L'évaluation des atteintes d'organe est restreinte à une échocardiographie et une microalbuminurie. En routine, l'épaisseur intima-média et l'élasticité artérielle ne sont donc clairement pas indiquées... Quant aux percentiles de référence, il faut souligner que vu l'absence de données de référence européennes, elles sont « made in USA ».
« Nous devons impérativement travailler à établir des références pédiatriques européennes » commente E Lurbe.
Prise en charge non pharmacologique d'abord et avant tout
Algorithme de traitement :
PA normale haute : pas de traitement pharmacologique
HTA non symptomatique et sans atteinte d'organe ni diabète : pas de traitement pharmacologique
HTA + symptômes (maux de tête) ou atteinte d'organe ou diabète et HTA mettant en jeu le pronostic vital : traitement pharmacologique.
Le traitement pharmacologique est donc utilisé en dernier ressort, réservé à l'HTA compliquée de diabète, avec atteinte d'organes ou très symptomatique. Pourquoi ? « Il s'agit d'un traitement chronique, à vie, et l'on n'a pas de données concernant ni sa sécurité ni son bénéfice à long terme dans cette population en terme de morbi-mortalité. Globalement on manque d'études cliniques en pédiatrie » résume E Lurbe. « On n'a quasiment aucune donnée avant 6 ans. Et des données très éparses après ».
Cibles tensionnelles :
cible générale < 90e percentile/âge, sexe, taille.
cibles si maladie rénale chronique : < 75e percentile en absence de protéinurie, < 50e percentile si protéinurie (MAPA des 24 h fortement recommandée pour ajuster le traitement)
« Attention au suivi à long terme toujours indispensable » souligne E Lurbe.
Mesures hygiéno-diététiques et monothérapies à faible dose
Les PA normales et les HTA sans complications relèvent d'un traitement non pharmacologique. Basé sur des mesures hygiéno-diététiques avec augmentation de l'activité physique, « son but est un IMC < 25 » résume E Lurbe. « On doit rester très prudent par rapport au traitement pharmacologique, donc axer d'abord l'intervention sur les traitements non pharmacologiques. Sans oublier les autres facteurs de risque influençant le risque de complications d'organe » ajoute t-elle.
Si un traitement pharmacologique est indiqué :
débuter par une monothérapie à faible dose au moins 4-8 semaines
si pas de réponse, passer à dose pleine
si pas de réponse, basculer vers une autre monothérapie et/ou passer à une bithérapie
bithérapie d'entrée lors de maladie rénale de stade 2
Nota : il n'y a aucune évidence pour privilégier telle ou telle classe. On manque d'études dédiées.
Une maladie orpheline
« L'HTA du jeune est encore une maladie orpheline. Nous n'avons pas de référence européennes pour les valeurs normales (données américaines), sur le risque cardiovasculaire, et très peu d'études cliniques.... Donc beaucoup de travail à faire » note E Lurbe.
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Citer cet article: Premières recommandations européennes sur l'HTA de l'enfant adolescent - Medscape - 24 juin 2009.
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