Arthropodes et maladies

Parmi les deux millions d’espèces d’arthropodes connues, des milliers sont vecteurs de pathologies humaines. Revue de détail de ces insectes hématophages.
29 juillet 2014

  • titre

    Des insectes et des hommes

    « Parmi les deux millions d'espèces d'arthropodes présentes sur terre, ce sont surtout les insectes et les arachnides qui sont vecteurs de maladies bactériennes, virales et parasitaires humaines », a expliqué le Dr Areki Izri (chef de service, Parasitologie-Mycologie, hôpital Avicenne, Bobigny) à l'occasion des 15 èmes Journées Nationales d'Infectiologie (JNI)  

    Ces pathologies représentent 17 % des maladies infectieuses. Elles sont à l'origine de plus d'un million de décès chaque année dans le monde, dont 660 000 pour le seul paludisme. La grande majorité de ces affections ne peut être traitée de façon efficace par des médicaments ni être prévenue par des vaccins .

  • titre

    Propagation facilitée

    C’est la propension de ces affections à gagner de nouveaux territoires qui va poser des problèmes dans les années qui viennent : par exemple aujourd’hui, 40 % de la population mondiale vit en zone d’endémie pour la dengue et l’incidence de cette affection a été multipliée par 30 en moins de 50 ans.

    Si ces maladies surviennent le plus souvent en zone tropicale, la France peut elle aussi être concernée. D’une part parce que 22 millions de ses habitants voyagent chaque année à l‘étranger. Et d’autre part parce qu’aujourd’hui encore, la France reste la première destination touristique mondiale.

    Rappelons que le moustique tigre (Aedes Albopictus), vecteur de la dengue et du chikungunya est présent dans 18 départements du sud de la France.

    Lien : Fort risque d’épidémie de Chikungunya cet été en Métropole

  • titre

    Les moyens de lutte

    Les recommandations aux voyageurs qui souhaitent se protéger contre les arthropodes doivent prendre en compte les risques individuels géographiques et comportementaux. Dans tous les cas, il est conseillé de porter des vêtements longs, de couleur claire, et d'utiliser des moustiquaires de lit, de porte et de fenêtre. Les insecticides en diffuseurs et bombe doivent aussi être utilisés et les répulsifs choisis avec attention (DEET, IR 3535, icaridine).

    Mais seuls le développement économique et l'amélioration des conditions d'hygiène permettront de limiter les risques de transmission de pathologie par le biais des arthropodes.

    Lien : Chikungunya : comment lutter contre le moustique tigre et la transmission

  • titre

    Moustiques

    Les anophèles

    Sur les quelques milliers d’espèces de moustiques ou diptères (nématocères culcidae) sur terre, on dénombre plus de 400 espèces d‘anophèles, près de 900 espèces d‘aèdes, 800 espèces de culex, 40 de culiseta… On en trouve sous les tropiques, mais aussi en Europe, Sibérie, Amérique du Nord… 

    Les anophèles sont des moustiques nocturnes dont les femelles sont hématophages et pondent en eau douce. Ils sont cosmopolites dans les régions tropicales mais leur répartition géographique reste spécifique : ils sont plus rares dans les villes que dans les campagnes. Outre la transmission de plasmodium (paludisme), ils peuvent être à l’origine d’infections humaines par arbovirus (O’Nyong Nyong, Ilesha..) et de filaires lymphatiques (W. bancrofi, A. gambiae, A. funestus, A. flavirostris, A. letifer…).

  • titre

    Aèdes

    Les aèdes sont des moustiques diurnes cosmopolites. Ils vivent en ville et en campagne, et se caractérisent par leurs facultés de déplacement et d'adaptation. Leurs femelles hématophages pondent des oeufs hors de l'eau et les larves se développent dans de petites collections aqueuses. Ils sont impliqués dans la transmission humaine des arboviroses (chikungunya, fièvre de la vallée du Rift, Ross Rive, encéphalite de Californie…), de la fièvre jaune et de la dengue, ainsi que de filarioses (D. immitis, W. bancrofti, B. malayi).

    Liens :

    Plus de 60 000 cas de chikungunya dans les départements français d'Amérique

    Dengue et de chikungunya dans le sud de la France : un risque bien réel

  • titre

    Les culex

    Les culex sont des moustiques nocturnes cosmopolites. On les trouve en ville et en campagne. Leurs femelles hématophages pondent dans des eaux riches en matière organique. Ils sont impliqués dans la transmission d'arbovirus : encéphalite japonaise, encéphalite de Saint Louis, fièvre du Nil occidental (West Nile, Dengue-like…) et de filarioses (W. bancrofti).

  • titre

    Les phlébotomes

    On recense plus de 800 espèces de ces insectes diptères qui appartiennent à une sous-famille des moucherons (famille des psychodidae) et non pas des moustiques. Les femelles hématophages de 2 mm environ piquent la nuit et pondent leurs œufs sur la terre, où ils se développeront en larves. Chaque année dans le monde, plus de 1,5 millions de personnes développent des leishmanioses après avoir été piquées par un phlébotome. Ces insectes peuvent aussi être à l'origine d'arboviroses (fièvre à papataci, phlébovirose toscane, sicilian, massilia…) et de bartonellose (Oroya, verruga peruana).

    Crédit photo : A Izri

  • titre

    Les glossines

    Ces diptères brachycères (muscidae, glossiniae) vivent seulement en Afrique et seulement entre le 20 ° parallèle sud et le 15 ° nord (Afrique subsaharienne). Les mâles et les femelles qui mesurent 16 mm en moyenne sont hématophages et diurnes. La ponte a lieu sur sol humide (forêt, sous-bois). Les glossines ont la particularité d'être attirées par le bleu azur.

    Elles sont à l'origine de la transmission de la trypanosomiase africaine ou maladie du sommeil qui doit son nom à la phase méningo-encéphalique de la maladie secondaire à l'envahissement du système nerveux central par le parasite.

    Crédit photo : Thinkstock

  • titre

    Les taons chrysops

    Plus de 200 espèces de taon chrysops vivent dans les forêts équatoriales humides d'Afrique tropicale. Leurs femelles pondent dans les sous-bois et les champs de café. Les taons hématophages piquent durant la journée, et ce sont les vecteurs de la filaire à Loa Loa ( loase ou ver africain de l'oeil).

    La loase provoque des oedèmes des bras et jambes (gonflements de calabar) et des signes cutanés en rapport avec la migration des vers adultes. Ces vers peuvent également migrer vers le tissu conjonctif de l'oeil.

  • titre

    Les simulies

    Les simulies sont des petites mouches (diptères), de 1 à 5 mm, de couleur sombre, vivant à proximité des eaux vives et des cascades. On en connait plus de 1000 espèces. Leurs femelles hématophages piquent pendant la journée et peuvent transmettre à l'homme l'onchocercose, ou cécité des rivières.

    La femelle adulte pond des milliers de microfilaires (larves) qui migrent vers la peau et les yeux causant un prurit intense et diverses manifestations oculaires conduisant après plusieurs années à la cécité.

    Dans certaines communautés d'Afrique de l'Ouest, près de la moitié des hommes de plus de 40 ans sont devenus aveugles à cause de la maladie.

    Crédit photo : Thinkstock

  • titre

    Les puces

    On en connait plus de 2000 espèces : « à chaque animal sa puce », rappelle le Dr Azri. « Mais chaque puce peut piquer d'autres espèces que son hôte… ». Ces insectes cosmopolites pondent sur le sol, et se sont les vecteurs des pestes (Y. pestis, P. irritans, X. cheopis), des rickettsies (typhus , R. mooseri), de bactéries (tularémie, F. tularensis), d'helminthes (ténia, D. caninum) et de trypanosomes.

    Crédit photo : A Izri

  • titre

    Les poux

    Ces insectes ectoparasites sont hématophages. Seules trois espèces spécifiques peuvent concerner l'homme : Pediculus humanus capitis (pou de tête), Pediculus humanus corporis (pou de corps) et Phtirius pubis (morpion).

    Seuls les Pediiculus humanus peuvent être vecteurs de maladies : typhus exanthémique (P. prowazekii), fièvre des tranchées (R. quintana) et fièvre récurrente à poux (B. recurrentis).

    Crédit photo : A Izri

  • titre

    Les punaises de lit

    Cimex lectularius est un hémiptère cosmopolite de la famille des cimicidae. Cet hématophage nocturne de moins d'un centimètre est devenu une nuisance mondiale en raison du tourisme. On en trouve dans les hôtels, les avions, les bateaux, les trains… En tant que première destination touristique mondiale, la France est particulièrement concernée. Si on ne recense pas encore de maladies liées à ces insectes, les conséquences médicales des piqûres – en particulier lorsqu'elles se répètent – sont importantes : stress, angoisse, insomnies, terreurs nocturnes, autres troubles psychologiques, anémies et lésions dermatologiques qui peuvent parfois être sévères.

    Crédit photo : A Izri

  • titre

    Les diptères myiasigènes

    Ces mouches sont les vecteurs des myiases de la peau saine (C. anthropophaga), des plaies (L. sericata) et des cavités.

    Une ou plusieurs larves sont pondues directement par la mouche sur la peau et peuvent s'enfoncer jusqu'à 1 cm environ. Cette présence provoque un furoncle ou un kyste sébacé qui ne répond généralement pas aux antibiotiques.

    Crédit photo : A Izri

  • titre

    Les tiques

    Ces acariens hématophages cosmopolites peuvent concerner plusieurs hôtes. Les tiques peuvent être vecteurs de bactéries (maladie de Lyme, Borrelia burgdorferi ; Fièvre boutonneuse méditerranéenne, Rickettsia conorii), de virus (encéphalite à tique, fièvre hémorragique), de protozoaires (babésiose bovine, B. bovis) et d'helminthes.

    La maladie de Lyme s'étend. Elle est présente aujourd'hui dans pratiquement toutes les régions de France avec une incidence particulièrement élevée en Alsace et dans la région Centre. Près de 15 000 cas sont diagnostiqués chaque année, un chiffre probablement sous-évalué du fait de la difficulté diagnostique.

    Lien : Le casse-tête diagnostique de la maladie de Lyme

  • titre

    Auteurs :

    Drs Catherine Desmoulins et Isabelle Catala, avec l'aimable collaboration du Dr Arezki Izri.


Référence
  • Izri A. Arthropodes et voyageurs : ils nous rendent dingues. 15èmes Journées Nationales d'Infectiologie. Bordeaux, 11-13 juin 2014.