A la découverte des médecines d’Asie

A la découverte des médecines d’Asie
A la découverte des médecines d’Asie
Les médecines d'Asie jouissent d'un intérêt croissant et sont de plus en plus souvent incluses dans les parcours hospitaliers et thérapeutiques conventionnels. A Paris, le musée Guimet consacre tout l'été une exposition aux trois grandes traditions médicales asiatiques : indienne, chinoise et tibétaine. Nous vous en proposons un aperçu via une sélection de 12 œuvres d'art exceptionnelles (à découvrir dans l'exposition jusqu'au 18 septembre 2023), évoquant des pratiques médicales millénaires mêlant équilibre des énergies et pharmacopée, massage et acupuncture, méditation et chamanisme, astrologie et exorcisme.
Exposition Médecines d’Asie
A la découverte des médecines d’Asie
Exposition Médecines d’Asie
Qu'il s'agisse de médecine indienne, chinoise ou tibétaine, le trait commun est une conception du corps comme parcouru de flux énergétiques, de l'équilibre desquels dépend la bonne santé du patient. A l'instar de la médecine d'Hippocrate et de Galien, ces médecines sont essentiellement préventives. Autre point commun avec la médecine occidentale : les pratiques médicales asiatiques s'appuient sur un ensemble de traités élaborés au cours des siècles.
Religieux hindou et son disciple, Inde, Deccan, vers 1700
A la découverte des médecines d’Asie
Religieux hindou et son disciple, Inde, Deccan, vers 1700
Médecine indienne : L'ayurveda, qui signifie en sanskrit « savoir (veda) pour prolonger la durée de vie (ayus) », a pour principe ce qu'on appelait jadis en Occident la « théorie des humeurs ». Le diagnostic des maladies se fonde sur l'examen méthodique des trois humeurs (dosha) – le vent (vata), la bile (pitta) et le phlegme (kapha) – commandées respectivement par les divinités Vayu, Agni et Varuna. La bonne santé du patient dépend de l'équilibre de ces trois humeurs. Elles varient selon des facteurs différents tels que le régime alimentaire, le métabolisme ou bien encore des influences extérieures, naturelles ou surnaturelles. Une bonne alimentation, l'absence d'excès et la pratique d'activités physiques comme le yoga peuvent garantir une bonne santé.
Chakras du corps subtil. Purusha, Népal, daté 1806, Musée guimet
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Chakras du corps subtil. Purusha, Népal, daté 1806, Musée guimet
Médecine tibétaine : Désignée dans la langue autochtone sous l'appellation de sowa rigpa, « science des soins », elle entre dans l'histoire tardivement, vers le 7e siècle, avec l'introduction dans le pays d'un système d'écriture qui, dès l'origine, en est le vecteur principal. La médecine tibétaine se singularise par de multiples emprunts étrangers, surtout indiens (notamment la théorie ayurvédique des humeurs), mais aussi chinois (certaines pratiques de diagnostic, telle la prise du pouls). La cause des désordres pathologiques est principalement recherchée dans l'alimentation, le mode de vie, les qualités des saisons et des lieux. Les mauvais esprits et le karma sont aussi occasionnellement évoqués.
Akasaka : l’impératrice Komyo lave le corps d'un lépreux pour le guérir, Utagawa Kuniyoshi, Japon 1852
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Akasaka : l’impératrice Komyo lave le corps d'un lépreux pour le guérir, Utagawa Kuniyoshi, Japon 1852
Médecines extrême-orientales : En Chine, en Corée et au Japon, l'équilibre harmonieux entre les fonctions organiques, les processus de renouvellement du corps et le mode de vie du patient procède d'un concept essentiel : le « souffle vital » ou qi. Celui-ci impulse la force de vie dans l'ensemble du corps et circule dans douze canaux connectés entre eux, appelés méridiens, correspondant aux douze organes principaux. Ainsi, la santé se conçoit comme le maintien d'un flux régulier et équilibré de sang et de qi qui se propagent sans obstacle dans les canaux.
Portrait du roi Jayavarnarman VII Cambodge, Angkor, Ta Prohm, fin 12e-début 13e siècle
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Portrait du roi Jayavarnarman VII Cambodge, Angkor, Ta Prohm, fin 12e-début 13e siècle
Les hôpitaux de Jayavarman VII au Cambodge : Datant de l'époque médiévale, au temps de la grandeur d'Angkor et de l'empire khmer, les hôpitaux au Cambodge figurent parmi les premiers lieux de soins du monde asiatique. Attribués au mécénat du grand roi bouddhiste Jayavarman VII, ces institutions publiques étaient accessibles à tous. Dans chaque hôpital travaillaient deux médecins, trois assistants, des magasiniers, des cuisiniers, des préparateurs et préparatrices de médicaments, des infirmiers…
Docteur prenant le pouls de sa patiente Felice Beato (1832-1909)
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Docteur prenant le pouls de sa patiente Felice Beato (1832-1909)
Le soin, méthodes et moyens : Préalable à tout soin, le diagnostic en médecine asiatique repose sur la concordance d'un faisceau d'indices révélateur d'éventuels déséquilibres des énergies du corps. Le praticien y accède au moyen de différentes techniques d'examens parmi lesquelles on retrouve l'observation du patient, l'interrogatoire, le sentir et l'écoute, ainsi qu'une prise de pouls au niveau du poignet, sur l'artère radiale du patient.
Mannequin d’acupuncture (détail), Chine, dynastie Qing, 18e siècle
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Mannequin d’acupuncture (détail), Chine, dynastie Qing, 18e siècle
Au terme de ces examens, divers traitements thérapeutiques sont utilisés dans le but de rééquilibrer les énergies internes. Parmi eux, l'acupuncture, désormais bien connue en Occident, qui traite les déséquilibres au moyen de fines aiguilles plantées sur les méridiens et les canaux d'énergie du corps. Ces derniers ne correspondent ni aux vaisseaux sanguins ni aux nerfs mais sont censés correspondre au trajet du souffle (qi) dans le corps. Selon les mêmes principes, la moxibustion consiste à stimuler les points d'acupuncture par la chaleur à l'aide de bâtonnets d'armoise, une herbe aromatique, en combustion lente.
Armoire à pharmacie, Chine, 19e siècle
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Armoire à pharmacie, Chine, 19e siècle
Les pharmacopées chinoise ou indienne consistent en un corpus de plantes d'une grande variété qui rappelle le lien existant entre les traditions médicales d'Asie et les sciences naturelles. Les matières médicinales, d'origine végétale ou animale sont collectées dans la nature qui entoure les médecins : forêts luxuriantes en Inde, montagnes en Chine. Parmi les plus connues, la noix d'arec, indispensable à la fabrication de la chique de bétel, le pavot, dont on tire l'opium médicinal, et certains champignons, censés assurer une grande longévité.
Postures de yoga Inde, Andhra Pradesh ou Tamil Nadu, vers 1820
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Postures de yoga Inde, Andhra Pradesh ou Tamil Nadu, vers 1820
Outre les plantes et l'acupuncture, la santé se cultive également par des exercices physiques qui raffermissent la vitalité tout en favorisant la bonne santé des pratiquants. Leur but est d'harmoniser l'esprit et de calmer le corps. A ce titre, certaines formes de yoga permettent de retrouver de la mobilité dans les articulations, et d'assouplir les muscles, les tendons et les ligaments. Elles permettent de gagner en souplesse et en équilibre, de revitaliser les organes grâce à un massage interne généré par certaines postures. Le qi gong, consistant en la réalisation de gestes lents, doux et répétitifs afin de stimuler la circulation de l'énergie, et sa version plus martiale, le tai chi, ont montré des résultats dans le traitement de nombreuses maladies gériatriques et des effets bénéfiques sur les douleurs chroniques. De même, la pratique de la méditation participe à de l'équilibre mental du patient.
Chaussures pour enfant à décor de tigre Chine, 20e siècle
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Chaussures pour enfant à décor de tigre Chine, 20e siècle
Vêtements de protection : Dans un monde où médecine et religion sont étroitement liées, les manifestations de la maladie, qui est l'expression d'un déséquilibre intérieur des flux énergétiques, peuvent résulter de causes surnaturelles comme l'action d'un démon ou les effets d'un mauvais sort. Pour se prémunir de mauvais sorts ou d'influences surnaturelles, des tissus et vêtements de protection, généralement recouverts de diagrammes et de formules magiques, peuvent être portés sur le corps ou bien suspendus dans les maisons. Dans la plupart des pays, ces vêtements étaient principalement destinés aux enfants, pour les protéger des maladies comme des menaces venues des mondes invisibles.
Masque Mahakola Sanni Yaka (ou Rajamulla Sanni Yaka), Sri Lanka, 19e siècle
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Masque Mahakola Sanni Yaka (ou Rajamulla Sanni Yaka), Sri Lanka, 19e siècle
Exorcisme : On peut s'étonner de voir l'exorcisme associé à la pratique de la médecine. Pourtant dans les médecines traditionnelles asiatiques, les maladies sont vues comme des déséquilibres dans le fonctionnement de l'organisme pouvant être causés par différents facteurs. Quand ces facteurs ont une origine surnaturelle en relation avec des influences démoniaques et des malédictions, s'applique l'exorcisme, une pratique rituelle consistant à faire sortir d'une personne l'entité maléfique qui la possède. Ayant parfois une dimension théâtrale, certains de ces rites utilisent des parures et des masques très expressifs, permettant à l'officiant de tromper le mal pour s'en protéger.
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